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Une première dans le monde de la haute-couture: la griffe de luxe italienne Bottega Veneta a décidé de quitter les réseaux sociaux. À l’heure où la mode domine l’empire d’Instagram, est-il judicieux de s’en passer ?
Mardi, la maison de luxe italienne Bottega Veneta supprimait ses comptes Facebook, Twitter et Instagram. La marque n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet, et n’a pas donné d’informations complémentaires pouvant expliquer cette décision des plus étonnantes.
Un choix surprenant, étant donné la place que les réseaux sociaux occupent depuis ces dernières années, une place d’autant plus grande dans le contexte actuel de crise sanitaire, qui pousse les maisons de luxe à redoubler d’inventivité et d’offres digitales, afin de rester résilientes.
Et c’est sans compter l’essor du e-commerce, passé de 12% à 23% du chiffre d’affaires des maisons de luxe. De plus, la principale cause de la hausse dans la côte de popularité de Bottega Veneta ces derniers temps viendrait des influenceurs.
“Il faut faire la différence entre avoir un compte Instagram et être sur Instagram, explique Benjamin Simmenauer, professeur à l’IFM. Ne plus avoir de page officielle ne signifie pas que Bottega Veneta ne sera plus présent. La marque arrête de produire du contenu dédié aux réseaux sociaux, mais la communauté, les fans, les clients continueront de poster, il y aura toujours des comptes officieux, des hashtags.”
Ce départ des réseaux sociaux porte-t-il en lui des revendications anti-Instagram, ou alors est-ce plutôt une opération de marketing ? Ce qui est certain, c’est que la décision a beaucoup fait parler, et notamment sur les réseaux sociaux.
En même temps, le choix de Bottega Veneta est plutôt en accord avec la démarche artistique de Daniel Lee, nommé directeur créatif de la marque en 2018. En effet, Daniel Lee ne possède pas de compte Instagram, et ne s’exprime que très peu publiquement.
“L’idée de renouer avec le culte du secret est le serpent de mer du luxe. Renouer avec la distance, l’inaccessibilité à l’heure de l’accessibilité et de la démocratisation que permettent les réseaux sociaux. C’est osé de dire ‘nous n’avons pas besoin de cet outil, nous sommes plus forts que ça’.”, décrypte Benjamin Simmenauer.
Pour Eric Briones, auteur du livre Luxe & Résilience, quitter les réseaux sociaux est un choix cohérent avec les ambitions écologiques actuelles: “On ne peut pas aspirer à respirer, à ralentir et à se déconnecter et continuer à nourrir la bête, vouloir moins de gaspillage et réduire son bilan carbone en fermant les yeux sur la pollution numérique”
Toutefois, Bottega Veneta conserve toujours ses profils sur les réseaux sociaux d’Asie. En Chine, le réseau WeChat est indispensable pour le canal digital. D’après les études du cabinet Bain & Company, les achats de produits de luxe par les Chinois (sur leur territoire et à l’étranger) représentent aujourd’hui entre 37% et 40% de la consommation mondiale. En 2025, ce chiffre devrait atteindre 50%.
“Ne pas couper sa présence en Chine signifie que c’est là où sont les clients et de fait leur marché prioritaire, explique Benjamin Simmenauer. Bottega Veneta n’est pas une marque artisanale, c’est l’un des fleurons du groupe Kering, leur chiffre d’affaires dépasse les 330 millions de dollars. Quitter les réseaux sociaux occidentaux, conserver ceux en Asie, c’est évidemment une décision stratégique, pas un caprice de directeur artistique”.
En juin 2019, Laura Rossi, une étudiante italienne, décide d’ouvrir un compte Instagram consacré à la griffe italienne (@NewBottega) après les débuts de Daniel Lee chez Bottega Veneta. La jeune femme a vu son nombre d’abonnés grimper depuis la suppression des comptes de la maison de luxe.
“Je me souviens avoir lu sa première interview dans Vogue, en 2018, juste après sa nomination. Personne ne savait à quoi s’attendre. Daniel Lee annonçait déjà ne pas vouloir tomber dans la logomania mais conserver les valeurs identitaires de la griffe, une certaine exclusivité, cultiver l’idée d’un luxe en sourdine. Cette décision, de quitter les réseaux sociaux témoigne d’une fidélité à ses engagements.”, raconte Laura Rossi.
L’étudiante a ajouté vouloir continuer l’activité de ce compte en dépit de l’absence de compte Instagram officiel: “N’étant pas rattachée à la marque, je vais continuer à poster un contenu qui ne sera pas nécessairement aligné avec leur ligne directrice. J’ai mon point de vue, il est au reflet de la façon dont les gens perçoivent la marque et une façon de maintenir le dialogue avec la communauté.”
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Photo à la Une : © Bottega Veneta[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]