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Jean-Luc Dechery est le CEO de la Maison Camille Fournet, qu’il a rachetée en 1994. Mais l’homme, discret, a également eu un parcours éminemment public : diplômé de l’Essec, ancien de l’Ena (promotion Voltaire), il fut notamment vice-président de la Fédération de la maroquinerie (FFM) qui rassemble près de 300 membres. Ce qui en fait l’une des plus importantes du Conseil National du Cuir (CNC). Camille Fournet produit 400 000 pièces (ou bracelets) par an et ses 300 salariés exercent à Tergnier (Aisne), site agrandi avec un nouveau bâtiment éco-conçu inauguré en 2019.
Le groupe international comporte une dizaine de sociétés, dont plusieurs filiales en Asie. Car si la marque française développe par ailleurs ce qu’elle sait faire de mieux, c’est à dire, la crème des bracelets de montre, elle n’en reste pas moins une marque de maroquinerie de luxe. Et ce, dans un secteur d’activité où les critères d’approvisionnement en peau sont de plus en plus responsables. D’autant que les réglementations légales sont strictes dans ce domaine, tout comme le traitement au chrome des peaux, ou leur assemblage à la colle. Entretien.
Quels sont les types de cuirs que vous utilisez ?
Nous utilisons principalement des cuirs exotiques et surtout l’alligator de Louisiane pour exercer notre savoir-faire historique dans le domaine du bracelet dédié à l’horlogerie de luxe, que ce soit pour les créations de la Maison Camille Fournet ou bien celles des marques horlogères prestigieuses que nous fournissons.
En résumé, nous fabriquons 400 000 bracelets par an dont 75% sont en cuir d’alligator. Pourquoi ? Parce que l’alligator est le cuir de référence pour l’équipement de la montre neuve de luxe, depuis le début des années 90. A cela, si vous ajoutez les autres cuirs exotiques, on monte à 90% des peaux utilisées. Et puis le restant se compose principalement des cuirs de veau, sans oublier les tissus.
Pour la maroquinerie, c’est plutôt l’inverse : 75% de nos matières sont des cuirs de veau et le restant représente principalement des cuirs exotiques, mais pas seulement.
Imaginez-vous pouvoir un jour remplacer les cuirs que vous utilisez par des matières alternatives?
Le cuir est la matière la plus ancienne utilisée par l’homme. Il y a bien sûr des choses que l’on peut encore améliorer pour éliminer les substances allergènes ou autres. Ou bien encore parfaire la traçabilité de l’origine des peaux, les conditions d’élevage, d’abattage…Mais cette matière reste exceptionnelle et unique. Alors pourquoi s’en dispenser ?
D’ailleurs, le cuir reste toujours très répandu même si l’on voit apparaître des matières alternatives qui lui ressemblent, bien qu’elles n’aient pas les mêmes propriétés. Ces nouvelles matières alternatives font beaucoup parler d’elles, bien que les quantités restent encore limitées.
Quelles types d’améliorations la filière cuir pourrait entreprendre selon vous pour être toujours plus durable?
Cela fait déjà plusieurs années que la filière française du cuir s’est saisie de sujets sociétaux. Elle a bien entendu très sensiblement élevé ses standards d’élevage, d’abattage et de suivi de traçabilité sur l’origine des matières. Aujourd’hui, la traçabilité des peaux d’alligator est particulièrement contrôlée, davantage même que pour le veau.
Cette dernière est organisée, à chaque étape, à commencer par les fermes d’élevage dont une part croissante bénéficie de la labellisation International Crocodillian Farmers Association (ICFA). L’association à l’origine de cette appellation regroupe des fermes situées dans le monde entier, principalement en Australie, au Zimbabwe, en Afrique du sud et aux Etats-Unis.
La plupart des tanneurs, notamment ceux qui appartiennent à de grands groupes de luxe, ont particulièrement à coeur de garantir cette traçabilité. Au-delà des tanneurs, il y a aussi les fabricants de maroquinerie – dont les bracelets – tels que nous. Aujourd’hui par exemple, nous sommes capables de tracer l’origine d’un bracelet et de répondre aux questions de nos clients à ce sujet.
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